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ciel

Habiter poétiquement le monde

Créativité

Peinture d'Anne Turlais

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Voir par en dessous

La vision poétique est celle des choses quotidiennes, mais regardées à la bonne distance, où elles nous apparaissent dans leur présence silencieuse et leur prix infini. Cela nous arrive quand elles nous sont rendues comme un don immérité, quand nous retrouvons les êtres dont nous avait privés la maladie, l’accident ou le deuil, quand nous rejoignons l’humanité simple, un moment offusquée par l’éclat des idoles; bref, quand nous voyons le monde comme le voient les pauvres, par-dessous en quelque sorte, si bien que la réalité devient une épiphanie.

Avouons que se maintenir dans la pauvreté du cœur qui ouvre l’accès à cette vision profonde est presque impossible. Comme un ludion, nous remontons à la surface de la vie où tout s’oublie si vite. Périodiquement, un évènement douloureux, une rupture, une honte, une humiliation, ou alors un bonheur désarmant, une naissance, la surprise d’un rayon de soleil qui « perce le toit » (Reverdy), nous ramènent à la « vue d’en bas » et rouvrent les sources de la poésie. Mais comme s’installer dans un lieu où nous sommes tellement démunis ?

 

Jean-Pierre Lemaire, Le baptême d’Icare

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Sacré en nous

« Qui êtes-vous jeune fille et quelle est donc cette part que Dieu en vous s’est réservée ? »

 

Paul Claudel, L’annonce faite à Marie

Peinture d'Odilon Redon

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Exulter dans la monotonie

Parce que les enfants ont une vitalité abondante, parce qu’ils sont d’un esprit farouche et libre, ils veulent donc des choses répétées et sans changement. Ils disent toujours : « fais-le encore » et la grande personne le fait encore jusqu’à ce qu’elle soit presque morte. Parce que les grandes personnes ne sont pas assez fortes pour exulter dans la monotonie. Mais peut-être Dieu est-il assez fort pour exulter dans la monotonie. Il est possible que Dieu dise chaque matin « Encore » au soleil ; et chaque soir à la lune : « Encore ».

Il se peut que ce ne soit pas la nécessité automatique qui fasse toutes les pâquerettes ; il se peut que Dieu fasse chaque pâquerette séparément mais n’ait jamais éprouvé de fatigue à les faire. Il se peut qu’Il ait l’éternel appétit de l’enfance car nous avons péché et nous sommes devenus vieux mais notre Père est plus jeune que nous.

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Gilbert Chesterton, Orthodoxie

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Vivants

Photo : Rajasthan 2010

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Rivière qui tremble

On dit qu’avant d’entrer dans la mer une rivière tremble de peur.

Elle regarde en arrière le chemin qu’elle a parcouru, depuis les sommets des montagnes, la longue route sinueuse qui traverse des forêts et des villages.

Et devant elle, elle voit un océan si vaste, qu’y pénétrer ne paraît rien d’autre que devoir disparaître à jamais.

Mais il n’y a pas d’autre moyen.

La rivière ne peut pas revenir en arrière.

Personne ne peut revenir en arrière.

Revenir en arrière est impossible dans l’existence.

La rivière a besoin de prendre le risque d’entrer dans l’océan parce que c’est alors seulement que la peur disparaîtra, parce que c’est là que la rivière saura qu’il ne s’agit pas de disparaître dans l’océan, mais de devenir océan.

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Khalil Gibran, La peur

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Etre

Ballet de New york

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Vivre en poésie

La poésie n’est qu’un étonnement / et les moyens de cet étonnement », observait André du Bouchet. Vivre en poésie, ce serait contempler, interroger tout visage, chaque paysage, n’importe quel objet ; au lieu d’habiter le monde en étranger, tenter de l’apprivoiser, de reconnaître la connivence qui nous unit à l’univers.

De l’étonnement à l’émerveillement, mais aussi à la rébellion contre tout ce qui réduit, obscurcit la splendeur de l’être. Une présence, une attention qui, loin de renier le réel ou de s’y soustraire, souhaite le recevoir dans sa mystérieuse épaisseur, le célébrer aussi. (…)

La poésie est, d’abord, une manière d’être au monde, qui, ensuite, s’exprime de mille et une façons. Un éveil du regard fouillant les apparences. Une sensibilité particulière de l’oreille aussi qui « voit » les mots en train de passer et les arrête au passage pour les dévisager. (…)

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Colette Nys-Mazure, La chair du poème, petite inititiation à la vie poétique

Illustration : Sempé, Enfances 

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Terre inclémente

Chacun sait que les terres inclémentes attachent leurs fils plus étroitement que les autres. Ce ne sont pas les riches propriétaires qu’il faut aller féliciter du pittoresque des landes, mais les pauvres gens, s’il en reste, pour qui trois moutons et une chèvre vont brouter la bruyère (…) ceux-là ont reçu l’âme limousine, ceux—là ont le sens merveilleux de la solitude et de la vaine durée où nous plongeons.

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André Thérive, Le Limousin

Photo : René Prestat, sculpteur

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La grâce d'être

Une femme vraiment belle est paisible au fond de son âme ; elle fait confiance à Dieu qu’elle a découvert digne de sa confiance. Elle dégage un sentiment de calme et de repos ; elle invite son entourage au repos. Elle parle de consolation. Elle sait que nous vivons dans un monde en guerre, que nous avons un ennemi vicieux, que nous cheminons dans un monde en ruines. Mais elle sait aussi qu’à cause de Dieu, tout est bien, tout finira bien. Une femme d’une beauté véritable offre aux autres la grâce d’être et l’espace de devenir. En sa présence, Nous pouvons relâcher la pression et la tension qui enserrent souvent notre coeur. Nous pouvons respirer dans la vérité que Dieu nous aime et qu’il est bon. 

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John et Stasi Eldredge, Coeur de Femme

Photo : Maylis Wilhelm Jaureguiberry, sculpteur

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